On a facilement tendance à oublier à quel point il est pratique d’avoir un robinet qui fonctionne. En Afrique, l’accès à l’eau est un enjeu quotidien.
Notre camp a été monté au milieu du bush. Comme nous sommes des êtres vivants, nous avons besoin d’eau. Celle que nous utilisons nous est fournie par la compagnie pétrolière canadienne Artumas, qui prospecte dans la région. La société a foré son propre puits et nous laisse y accéder, gratuitement. Tirée en profondeur, cette eau a un goût qu’on n’hésitera pas à qualifier de dégueulasse. Mais elle est saine. Pas besoin de la traiter.
Nous allons la chercher à Palma avec une citerne de 1500 litres tous les 2 ou 3 jours. Soit 5 heures de route. Cela coûte de l’essence et du temps.
Notre robinet.
« L’important, c’est de ne pas empiéter sur les ressources des villageois. Pour nous, l’accès à l’eau est une question d’argent. Eux, il s’agit de leur vie », explique Mark McAdam, un des responsables de notre camp.
Il n’y a pas d’eau à Nhica de Rovuma. Les villageois ont creusé des trous dans la prairie pour collecter l’eau de pluie. Elle n’arrive toujours pas. Ils vont donc se fournir vers le lac, assez éloigné. Ce sont principalement les femmes et les filles qui vont chercher l’eau dans des bassines qu’elles portent sur leur tête. Belles images pour les photographes, dos fracassé pour les porteuses. Ce travail représente une grande partie de leur quotidien.
« Bonjour mademoiselle »
Histoire enseignée dans les cursus humanitaires : une ONG débarque dans un village africain, constate que les femmes doivent marcher 10 km pour aller chercher l’eau et construit un puits au centre du village pour les soulager. Pour se rendre compte après coup que le temps de l’eau était le seul où les femmes restaient autonomes, sans la pression des hommes. En modifiant l’agencement social, le nouveau puits a finalement réduit leur liberté. « J’ai entendu des histoires de femmes détruisant les puits pour pouvoir conserver leurs habitudes » confirme Mark McAdam. Pas simple, le développement.
Comment l’eau est-elle utilisée au camp ? Il faut d’abord boire et cuisiner. L’organisation nous a briefé : même si nous disposons de petits seaux faisant office de douche, la toilette n’est pas une priorité. Alors oui, nous sentons parfois le phacochère, mais c’est le prix à payer pour faire avancer la science. Au village de Nhica, le concept de douche n’existe pas. Les habitants se lavent au lac, quand ils le peuvent.
Notre expédition utilise environ 800 litres d’eau par jour. Soit environ 20 litres par personne. C’est à peu près la consommation d’une famille entière au village.
En France, la consommation domestique par habitant s’élève à 137 litres par jour.